Les clauses de non-concurrence ne sont pas limitées au secteur privé ou lucratif. Une association peut licencier pour faute grave un salarié exerçant, à titre personnel, une activité identique à la sienne. Ainsi, une association exerçant une activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs dans le département de la Manche a recruté en 2008 un salarié en qualité de délégué à la tutelle. Le contrat de travail précisait que le salarié s'interdisait de demander sa désignation en tant que gérant de tutelle privé (c’est-à-dire une activité identique à celle de l'association mais exercée à titre libéral) dans le département et les départements limitrophes. Au cours de l'année 2011, l'association avait financé une formation obligatoire d’un coût de 11 000 € permettant au salarié de continuer à exercer ses fonctions de mandataire judiciaire. Or, l'association a constaté que ce salarié avait demandé et obtenu en juin 2013 son agrément pour exercer à titre individuel l'activité de mandataire judiciaire de majeurs protégés, ayant donné lieu à son inscription sur la liste départementale des mandataires agréés. L'association a licencié en octobre 2013 son salarié pour faute grave. Ce dernier a saisi le tribunal des prud'hommes qui a annulé le licenciement au motif qu'il ne pouvait être reproché au salarié un acte de concurrence déloyale car cette notion concerne une activité commerciale : la simple désignation par un juge des tutelles d'une association ou d'une personne en tant que mandataire judiciaire ne relèverait pas d'une activité commerciale et ne peut donc pas être concurrencée. La cour de cassation censure la position des prud'hommes : le salarié a manqué à son obligation de loyauté vis-à-vis de son employeur et a commis une faute grave en utilisant ses fonctions et les moyens mis à sa disposition dans le cadre de ses fonctions pour créer, développer ou participer à une activité professionnelle distincte à l'insu de son employeur. Cour de cassation, ch. soc, 11/04/2018, n° 16-24.749.
Romain Boisset le 21 mars 2019 - n°232 de Communes et Associations