Éditions Sorman

La gestion des associations présente un caractère très particulier que les dirigeants et bénévoles de ces structures semblent parfois avoir oublié. Il est à craindre que le manque de culture, dans les domaines de la gestion et de l'organisation, au risque de déplaire à certains de nos lecteurs, soit à l'origine de la désaffection des collectivités pour le régime des subventions et le recours, de plus en plus fréquent, aux procédures de la commande publique. Comment peut-on expliquer qu'une structure à vocation désintéressée, dont les missions sont accomplies par un certain nombre de bénévoles, puisse ne pas être aussi, voire plus performante que des entreprises assujetties aux impôts commerciaux et à des contraintes résultant d’une législation sociale et d’un code du travail à dépoussiérer dans l'intérêt même des salariés. Je ne suis pas certain que la loi sur l'économie sociale et solidaire (ESS) soit la réponse unique au mal qui ronge notre système associatif. Les difficultés de gestion des communes qui résulteront inévitablement (quels que soient les efforts d'optimisation nécessaires) de la réduction des dotations de l'Etat conduiront inéluctablement les municipalités à rationaliser leurs relations avec les associations et à s’appuyer sur les plus performantes. Mais la gestion des associations est forcément complexe : elle ne relève pas, a priori, d’une organisation hiérarchisée, du moins c'est ainsi que le perçoivent les bénévoles et un nombre significatif de dirigeants.
Un autre problème guette les associations : l'uberisation de la société. Ce phénomène multidisciplinaire, multidimensionnel et inéluctable, qui transforme en profondeur notre économie, ne fera certes pas obstacle à la volonté d'adhérer à une association ; mais il pourrait apparaître comme un concurrent sérieux du secteur associatif, en termes de service rendu et de mobilisation des financements.
Face à ces phénomènes, une nouvelle culture doit émerger au sein des associations. En forçant le trait, « l'association n'est pas le moyen de faire ce que l'on veut n'importe comment ». Nous devons apprendre à pratiquer nos hobbies, vivre nos passions avec plaisir mais dans une cadre structuré, organisé, soucieux d’exercer et de produire plus, mieux et moins cher. J'entends déjà les cris d'orfraie : "on ne gère pas une association comme un entreprise". Certes, une association est avant tout une finalité et des objectifs, un engagement partagé, un projet élaboré démocratiquement. Mais c'est aussi la déclinaison de ce projet en plans d'action soumis à l'approbation des adhérents, c'est un schéma directeur des ressources humaines incluant (surtout) les bénévoles, une totale transparence sur l'utilisation des recettes, notamment sur les frais de missions et de déplacements. Ainsi, lors de la constitution de l'association, il conviendra de s’assurer que certains dirigeants n'espèrent pas tirer des revenus des associations. Cette considération ne fait pas obstacle à ce que s’exerce la solidarité, dans le respect des statuts ou des possibilités individuelles de chacun. Tout au contraire.

Jacques KIMPE le 15 octobre 2015 - n°156 de Communes et Associations