Le rescrit : un gage de sécurité juridique pour les associations Abonnés
Les associations peuvent généralement avoir recours à différentes procédures de rescrit, notamment :
- le rescrit « régime fiscal » qui peut être utilisé par une association qui s’interroge sur son assujettissement aux impôts commerciaux ;
- le rescrit « mécénat » qui permet à une association d’interroger le fisc sur son éligibilité au mécénat, c’est-à-dire au fait de recevoir des dons et à délivrer des reçus fiscaux (permettant une réduction d’impôts chez les donateurs), comme dans le cadre de l’affaire visée en page 2 ;
- le rescrit « social » qui permet d’interroger l’URSSAF sur les cotisations sociales ou la conformité aux règles du droit du travail.
Les associations sont aujourd’hui moins frileuses à utiliser ces procédures de rescrits, car elles ont bien compris l’intérêt qu’elles pouvaient avoir à engager la discussion avec les administrations concernées et pouvoir ainsi offrir un cadre sécurisé à leurs membres, leurs partenaires ou leurs donateurs. C’est surtout le rescrit « mécénat » qui est le plus utilisé (environ 6 000 par an) : il représente près du tiers de l’ensemble des rescrits délivrés.
Qu’est-ce qu’un rescrit ?
Le rescrit permet à l’association d’obtenir une réponse formelle de l’administration sur une situation donnée. Par sa réponse écrite, l’administration sera donc engagée par la position qu’elle adopte vis-à-vis de l’association qui a formulé la demande. C’est à l’association elle-même que revient l’initiative de lancer la procédure de rescrit (par un courrier accompagné de toutes les pièces utiles), en particulier si elle envisage une opération qui pourrait avoir des implications fiscales, ou si elle s’interroge sur sa propre situation.
La réponse qui est donnée par l’administration est strictement personnelle : elle sera donc valable uniquement pour l’association qui en aura fait la demande. Ainsi, une association ayant des activités similaires ne pourra pas s’en prévaloir en cas de conflit avec le fisc par exemple. Seuls les rescrits fiscaux officiellement publiés par l’administration fiscale dans le Bulletin Officiel des Finances Publiques – Impôts (BoFiP) sont opposables par tous les contribuables.
La procédure de rescrit est souvent relativement longue (prévoir plusieurs mois) : elle nécessite de fournir à l’administration un certain nombre d’éléments sur la base desquels celle-ci établira sa décision. Souvent, les informations ou les critères visés sont complexes et il est recommandé de se faire assister pour les compléter.
Conseil : pour les rescrits fiscaux, il peut être utile d’interroger le correspondant "associations" qui est désigné dans chaque Direction départementale des finances publiques ; il pourra répondre aux questions sur la procédure, aider à compléter les formulaires et en expliquer les enjeux.
Attention : le rescrit n’est valable qu’à un moment donné, sur la base des informations soumises au fisc. Si la situation de l’association ou ses activités changent, l’association ne pourra plus se prévaloir de ce rescrit devant l’administration fiscale en cas de contrôle.
Rescrit « régime fiscal »
Par cette procédure, l’association peut interroger l’administration fiscale sur le caractère lucratif ou non de son activité afin de savoir si elle est ou doit être soumise aux impôts commerciaux. La demande doit être envoyée au service des impôts dont dépend l’association, en envoi recommandé avec accusé de réception. L’administration fiscale a normalement 3 mois pour répondre, mais ce délai pourra être étendu si des informations ou des documents complémentaires sont réclamés. Attention, ce délai est indicatif et le fisc peut ne pas répondre (dans ce cas une absence de réponse n’est pas assimilée à une réponse positive).
Cette analyse est réalisée par l’administration fiscale en trois étapes, une réponse positive à l’une des étapes entraînant l’assujettissement aux impôts commerciaux. Ainsi, le fisc va vérifier :
- étape 1 : si la gestion de l’association est désintéressée. Pour cela, l’administration regarde si l’association est gérée et administrée à titre bénévole, si elle ne verse aucun bénéfice et si les membres de l’association ne sont pas attributaires d’une part de l’actif de l’association ;
- étape 2 : est-ce que l’association concurrence une entreprise ? Si c’est le cas, il faut passer à la 3e étape ;
- étape 3 : est-ce que les activités lucratives de l’association sont exercées dans les mêmes conditions qu’une entreprise du secteur commercial. L’administration applique alors la règle dite des « 4P » de l’activité, à l’aide d’un faisceau d’indices, qui consiste en une analyse de quatre critères (les 4P) : le Produit proposé par l’association, le Public visé, le Prix pratiqué et les opérations de Publicité réalisées.
Conseil : la procédure de rescrit peut être à double tranchant, notamment si l’association a toujours pris la position qu’elle n’était pas assujettie aux impôts commerciaux. Si l’administration considère à l’inverse qu’elle y est assujettie sur la base des éléments fournis, cela pourrait donner lieu à un contrôle fiscal notamment sur les 3 dernières années, avec un impôt à payer potentiellement élevé. Il est recommandé de bien veiller à se renseigner, notamment auprès du comptable de l’association, d’autres associations similaires, voire d’un conseil fiscal avant d’entamer une telle démarche.
Rescrit « mécénat »
Rappel : conformément aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts, peuvent bénéficier d’une réduction d’impôts, les particuliers ou les entreprises qui effectuent des dons au profit de certaines associations.
Par le biais de la procédure de rescrit « mécénat » visée à l’article L. 80 C du Livre des procédures fiscales, l’association va pouvoir demander à l’administration fiscale de lui confirmer qu’elle respecte bien les conditions ci-dessous et ainsi qu’elle peut valablement délivrer des reçus fiscaux. Attention : une association peut émettre des reçus fiscaux à raison des dons qu’elle a reçus sans obtenir d’autorisation préalable, si elle estime que les conditions de l’article 200 du code général des impôts sont respectées. Le rescrit ne constitue donc pas une autorisation pour l’association : elle peut très bien délivrer des reçus fiscaux sans avoir demandé à l’administration fiscale de le faire. Dans la cadre de cette procédure, le fisc va examiner si l’association :
- a un objet social ou exerce une des activités présentant un ou plusieurs des caractères suivants : philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial ou culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises ;
- a un caractère d’intérêt général. Pour cela, elle vérifiera si l’association ;
- a un caractère non lucratif, c’est-à-dire que sa gestion est désintéressée et qu’elle n’entre pas en concurrence avec des sociétés commerciales ;
- n’agit pas au profit d’un cercle restreint de personnes, par exemple d’un ou plusieurs membres, associations, artistes, etc.
La demande doit être envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception au service des impôts du lieu du siège de l’association, selon le format fournit par l’administration fiscale au BoFiP, BOI-LETTRE-000132 (disponible à l’adresse Parmi les 1,3 million d’associations françaises, plus de 10 % sont employeuses et comptent près de 1,8 million de salariés. Pour celles-ci, le sujet des délégations de pouvoir est souvent essentiel, en particulier quand elles souhaitent se séparer d’un employé puisque ce dernier va fréquemment contester son licenciement devant les prud’hommes, en utilisant généralement comme argument premier le fait que la personne qui l’a licencié n'avait pas le pouvoir de le faire.
Le fonctionnement d’une association est quasi exclusivement régi par ses statuts et la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association est muette sur la question des délégations de pouvoirs. Pourtant, lorsque les statuts sont imprécis, les tribunaux considèrent que c’est au président qu’échoient les principaux pouvoirs au sein d’une association, notamment celui de licencier, qu’il peut évidemment déléguer. Mais dès qu’il existe des variantes ou des spécificités statutaires, par exemple si les pouvoirs du président lui sont confiés par un autre organe (conseil d’administration par exemple) ou que les statuts dressent une liste trop précise des pouvoirs qui peuvent être délégués (voir sous-délégués) par tel organe ou tel dirigeant, il n’est pas rare qu’existent des omissions ou des incertitudes. Pourtant, il est essentiel de savoir qui détient le pouvoir car, rappelons-le, une personne peut uniquement déléguer un pouvoir qu’elle détient de façon légitime.
Conseil : il est recommandé de prévoir dans les statuts le principe de la délégation de pouvoir, sans pour autant entrer dans trop de détails qui pourraient devenir des inconvénients si jamais ils ne sont pas strictement suivis. De même, il est préférable d’indiquer quel est le processus de délégation et, notamment, s’assurer que celui-ci puisse laisser des traces ou des preuves écrites qu’il a bien été respectées. Ce manque de formalisme est souvent à l’origine des condamnations des associations en matière de licenciement, comme en témoignent les deux affaires récentes jugées par la Cour de cassation.
Dans une première affaire, une association œuvrant auprès de personnes en difficulté avait mis à pied, pour une durée de 3 jours, par une lettre signée de la directrice des ressources humaines (DRH), une employée ayant près de 20 ans d’ancienneté. Six mois après, celle-ci était licenciée pour motif personnel ; elle a alors saisi la juridiction prud’homale pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. A l’appui de sa contestation, la salariée mettait en avant le fait que la DRH n’avait pas de pouvoir pour lui infliger la sanction disciplinaire. L’association se défendait en indiquant que la délégation du pouvoir de licenciement, prévue par les statuts dans son principe, pouvait être tacite au moment de son utilisation réelle. En effet, les statuts stipulaient que le président pouvait déléguer ses pouvoirs à un ou plusieurs mandataires, mêmes non-membres de l’association, pour une opération déterminée, à charge d’en rendre compte. Ainsi, pour la Cour de cassation, si la délégation de pouvoirs du président est prévue par les statuts, c’est uniquement sous condition de délimitation de l’opération et de compte-rendu ultérieur. De fait, cette formulation exclut la possibilité que la délégation soit implicite, y compris à une salariée de l’association en charge des ressources humaines. Enfin, bien que la fonction de gestion des ressources humaines soit la plus légitime pour gérer un licenciement, cela ne crée pas, pour autant, une présomption de délégation qui, en toute hypothèse, devra être prouvée.
Dans une seconde affaire, un chef d’établissement d’une association d’aide aux personnes âgées avait été mis à pied à titre conservatoire, puis licencié pour faute grave par le directeur général de l’association. Comme dans la première affaire, le salarié a alors contesté ces décisions et a demandé des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse. La personne licenciée s’appuyait, elle aussi, sur les mêmes fondements, en contestant la délégation de pouvoir accordée au directeur général. Les statuts de l’association prévoyaient pourtant la possibilité pour le président d’accorder une délégation de pouvoir au directeur général, sous réserve que cette délégation soit agréée par le conseil d’administration, ce qui avait été le cas. Ici, c’est la délimitation de cette délégation qui était en cause : les statuts ne visaient en effet que la possibilité pour le président de déléguer au directeur l’embauche du personnel et rien n’était mentionné sur le licenciement de ce même personnel. Les juges s’appuient alors sur le parallélisme des formes pour reconnaître que celui qui a le pouvoir d’embaucher a également, en principe, le pouvoir de licencier, et que ce pouvoir peut être délégué. Or, la fiche de poste du directeur général de l’association, co-signée par la présidente de l’association et ce-dernier indiquait clairement que « le directeur général est chargé avec le président du recrutement et du licenciement des chefs d’établissement ». Bien que ce document soit hors du cadre des statuts, le juge s’appuie donc sur cette fiche de poste pour compléter ce que prévoient les statuts. Constant que rien dans les statuts ne vient par ailleurs limiter ou interdire le pouvoir de licencier du président, la Cour de cassation confirme que, dans cette affaire, le directeur général disposait bien, par délégation, du pouvoir de mener la procédure de licenciement. Cour de cassation, 14 juin 2023, n° 21-23461 et n° 24162. https://www.service-public.fr/associations/vosdroits/R47828). L’administration fiscale a un délai de 6 mois pour répondre à compter de la réception de la demande. Comme pour le rescrit « régime fiscal », elle peut demander à l’association des informations ou documents complémentaires qui peuvent faire repousser ce délai.
Conseil : il est recommandé de ne pas émettre de reçus fiscaux durant les 6 mois suivant la date de la demande car, en cas de réponse négative, ces reçus seraient alors illégaux.
Si le délai maximal est dépassé et que le fisc n’a toujours pas répondu à la demande, l’association pourra émettre des reçus fiscaux. La jurisprudence administrative considère en effet que le silence gardé par l’administration interdit seulement à celle-ci d’appliquer les amendes fiscales (notamment l’amende de 25 % des sommes indûment mentionnées sur des reçus fiscaux de dons, en application de l’article 1740 A du Code général des impôts).
Contestation d’un rescrit fiscal
Que ce soit pour la procédure de rescrit « régime fiscal » ou « mécénat », l’association qui ne serait pas satisfaite de la réponse de l’administration fiscale peut contester cette décision. Dans un premier temps, elle peut demander, dans un délai de 2 mois à compter de la réception de la réponse, un second examen de sa demande, qui doit être envoyée au service des impôts qui a rendu le premier avis. Ce second examen sera réalisé par des responsables de l’administration ayant des grades plus élevés et qui n’ont pas participé à la première décision.
Si elle obtient un second avis défavorable, l’association peut toujours porter sa contestation devant le tribunal administratif en expliquant, par exemple, que ce refus de délivrer des reçus fiscaux impacte fortement ses ressources financières et l’empêche ainsi de réaliser correctement ses actions.
Rescrit « social »
Cette procédure de rescrit permet à toute association cotisant à un organisme de recouvrement (par exemple URSSAF) d’obtenir une réponse ou une clarification sur l’application de la règlementation sociale à sa situation spécifique.
Ce rescrit peut être demandé aux caisses d’URSSAF, aux caisses générales de sécurité sociale (CGSS) mais également à l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). Il peut être demandé soit directement par l’association, soit par un mandataire (expert-comptable par exemple). Les questions qui peuvent être posées dans le cadre du rescrit social concernent la législation relative aux cotisations et contributions de la Sécurité sociale contrôlées par les Urssaf et CGSS, mais aussi la conformité aux dispositions légales d'un accord ou plan d'action sur l'égalité professionnelle, ou encore sur la réglementation relative aux obligations d'emploi de travailleurs handicapés.
Romain Boisset le 16 novembre 2023 - n°334 de Communes et Associations
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